Vendue
On a tous eu cette guitare, n’est-ce pas ? Cette guitare que l’on revend puis que l’on rachète, que l’on ne voit pas comme une guitare pour la vie mais qui nous manque lorsqu’elle n’est plus là. Voici cette guitare pour Joe Bonamassa. Elle n’a pas été faite pour lui, mais c’est évidemment une guitare qui a été commandée spécialement en 1998.
Le guitariste inconnu qui l’a demandée voulait une ES-295 en cherry red (alors qu’il s’agit généralement d’une guitare qui a la même finition gold top que les premières Les Paul) avec trois P90 au lieu des deux habituels, un Bigsby (plutôt que le chevalet trapèze) et un support pour poser son avant-bras (comme si la ES-295 normale n’était pas assez flashy). Bien sûr, ce support se devait d’être assorti au pickguard. Le résultat est une guitare au look incroyable, à la fois familière et parfaitement unique.
Joe a acheté cette guitare à Nashville, et la facture se trouve encore dans l’étui. Il l’a beaucoup utilisée pour son album de 2011 Dust Bowl, l’un de ses meilleurs sur lequel on retrouve l’excellente reprise de John Hiatt “Tennessee Plates”. Suite à quoi il l’a revendue, mais l’a ensuite rachetée lorsqu’elle a été remise en vente. Il a finalement bien voulu la vendre à Matt’s Guitar Shop, sans doute en se disant qu’il avait déjà fait l’album qu’il devait faire avec elle. Mais, comme nous le savons tous, ce sentiment terrible peut toujours réapparaître et si vous achetez cette guitare, préparez-vous à ce que Joe tente de vous la racheter un jour !
(1977)
Guitare principale : Gibson Les Paul Standard 1959
Titre à écouter absolument : Sloe Gin
Pas facile de s’inventer comme artiste adulte lorsqu’on a été un enfant prodige. Joe a été l’élève de Danny Gatton et le protégé de B.B. King alors qu’il n’était même pas encore en âge de conduire une voiture, et tournait avec le groupe Bloodline (avec d’autres enfants prodiges fils de stars comme Miles Davis ou Robby Krieger) avant de pouvoir voter. Mais tout aurait pu s’arrêter aussi sec, et d’ailleurs les autres membres de Bloodline ont tous disparu dans l’éther du show business. Mais Bonamassa a toujours eu une éthique de travail imparable, et à force de tourner il a fini par imposer son propre son et sa discographie solo.
Tout commence en 2000 avec A New Day Yesterday, un disque de blues tout à fait honnête sur lequel des invités comme Leslie West, Greg Allman et Rick Derringer viennent adouber le jeune musicien. À l’époque, Bonamassa joue sur Strat et Tele et l’influence de Stevie Ray Vaughan est encore audible dans beaucoup de ses phrases. Puis, petit à petit, il trouve sa propre voie lorsqu’il passe sur Les Paul et qu’il combine ses Marshall Silver Jubilee à quelques autres têtes boutique pour un résultat aussi bluesy que gras et organique. C’est aussi l’époque où le producteur Kevin Shirley commence à collaborer avec Bonamassa, une collaboration qui commence avec You & Me (2006) et continue à ce jour. Sloe Gin (2007) et Ballad Of John Henry (2009) sont autant de cartons qui installent la réputation de Joe comme le sauveur du blues, l’avenir d’un style que l’on croyait réservé aux baby boomers à l’aube de la retraite.
Depuis Bonamassa, n’a pas ralenti son rythme de tournée, et redouble d’inventivité pour varier ses spectacles, qu’il s’agisse d’un concert hommage à Muddy Waters et Holwin’ Wolf, d’une tournée hommage aux trois Kings du blues ou au British Blues Boom. Il joue aussi sur les albums de la chanteuse Beth Hart ainsi qu’avec les groupes Black Country Communion (aux côtés du bassiste chanteur Glenn Hughes) et Rock Candy Funk Party. En parallèle, la collectionnite aiguë de celui qui est né dans la guitare (son père tient un magasin) n’a fait que s’aggraver au point qu’il possède une dizaine de bursts, deux V Korina et un nombre ahurissant d’instruments rares. Pour autant, ces guitares ne sont pas stockées à l’abri puisqu’elles partent sur la route avec Joe. Après tout, elles ont été fabriquées pour ça.